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Photo du rédacteurMarc Meganck

Les trottinettes de la gloire


Il y a un nouvel indicateur dans la ville : les trottinettes. Entassées-renversées sur les trottoirs, dans les escaliers, les accès au métro, les fossés, les fontaines, les sous-bois, elles en disent long et court sur les velléités de certains de se déplacer en suivant les codes de la néo-mollesse du siècle 21. Électriques, elles n’ont de « trottinette » que le nom, puisqu’il ne faut même plus mettre un pied à terre – plus trottiner – pour les faire avancer. Elles résument les départs fictifs vers un ailleurs si proche, les retours approximatifs dans la nuit, les désertions et les fuites sans gloire. Il suffit de compter celles qui sont abandonnées en vrac devant un immeuble ou un bar pour avoir une estimation du nombre de participants à la dernière soirée. Une estimation seulement, car les plus audacieux s’y agglutinent à trois, voire à quatre, dans un équilibre précaire et grotesque tenant de l’expérience circassienne. Les trottinettes électriques « partagées » (selon la novlangue prêchée par la sphère bobo) sont les derniers jouets d’adolescents attardés restés trop longtemps devant un jeu vidéo et confondant gadget et liberté. Les critiquer vous range illico parmi les réacs et les climatosceptiques – parmi les anti-cons ? La révolution à 25 km/h ! La classe ! Cheveux au vent, les nouveaux James Dean de pacotille se fracassent sur l’asphalte dans une curieuse fureur de vivre. Leurs bolides bas de gamme les propulsent dans l’incertitude de l’époque, ils enlaidissent la ville, compliquent la déambulation pédestre, fauchent les gamins. Ils font des piétonniers des pistes de courses de demi-fond avec obstacles colorés et clignotants. Qui a voulu ça ? Qui a permis ça ? Sans doute quelques édiles locaux pressés de s’en mettre plein les poches par le biais des taxes de mise en circulation. Trotte, trottinette ! Trop de trottinettes ! Elles se propagent partout à la manière d’une lèpre. Leur production de masse et le chargement intempestif de leurs batteries grattent le projet écologique là où ça fait mal. Elles ne sont en rien une solution aux problèmes de pollution, en rien une solution pour limiter le nombre de voitures. La mobilité bien-pensante a fait son travail de sape. Il y avait pourtant une alternative : faire la promotion de la marche en ville, la seule manière de laisser s’évader ses idées, de les ancrer dans le poétique et la réalité lente…


Photo : Unsplash

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