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Photo du rédacteurMarc Meganck

C'est beau, une ville en paix

Dernière mise à jour : 4 mars 2022


Longtemps j’ai été – et sans aucun doute le suis-je encore par d’inoxydables aspects oscillant entre hédonisme et égoïsme primaires – un ouest-occidental éternellement insatisfait de sa condition, jamais assez belle, jamais assez confortable, jamais assez jouissive, jamais assez… Jeudi 3 mars 2022, 17h57. Je passais place Poelaert. Du monde convergeait vers les parapets ou y était déjà accoudé. De la jeunesse, de l’espoir – l’avenir. Des couples, des belles, des mectons bourrés d’intentions bonnes ou discutables. Panorama sur la ville. Bientôt le coucher de soleil. À l’horizon, le ciel était zébré de pourpre, de rouge, de rose, d’orange, la palette complète, avec quelques dernières balafres bleutées et de rares nuages ouateux fuyant on ne sait où. Vent tiède. Impression de printemps avant l’heure. Vestes ouvertes et masques tombés. Amoureux enlacés, amis assis en cercle – baffles JBL et basses sourdes, rires, embrasement collectif en attendant le soir, et puis la nuit, et puis… Jamais cette ville – avec laquelle j’entretiens un irrépressible rapport d’amour-haine –, non jamais Bruxelles ne m’avait parue aussi belle, aussi paisible. Certes avec ses imperfections, ses ratés, ses bavures urbanistiques qui piquent les yeux. Mais le tableau avait de l’allure, de l’allant, un attrait semblable à ce que vendent les catalogues-cartes-postales des tour-operators qui invitent au voyage. Musique, discussions, bouteilles entrechoquées pour trinquer. J’ai rejoint la meute joyeuse au parapet. Il y avait une douceur de vivre – de vivre longtemps. À deux mille bornes, l’Ukraine mordait la poussière, elle bouffait les décombres, elle respirait l’âcre et s’habituait au goût du sang dans la bouche et aux enfants aux yeux rouges. À deux mille bornes de Kiev, la soirée m’était offerte, multiple, riche, sécurisée, sans menace imminente,... sans pleine conscience du drame. Et je me disais que, partout sur cette Terre, c'est beau, une ville en paix.



Photo : Unsplash

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